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mercredi 2 février 2022

Un souvenir : "Le Gros Poisson du lac" de Ramuz, édité par Séquences, avec postface de Gérald Froidevaux, a trente ans !

 Notre ami André Durussel nous communique le billet qu'il a écrit sur le blog de la Fondation Ramuz :

https://www.fondation-ramuz.ch/post/le-gros-poisson-du-lac?postId=86b4ccea-9e0b-4720-b5fe-a9fd9cc10caf&utm_campaign=d9a74283-9a65-47b6-9250-515a147d31d0&utm_source=so&utm_medium=mail&utm_content=b07ab15c-e967-4f88-9217-f8a00a2ff90f&cid=88d4323a-8fe9-4227-8eed-f6bae681624b

Le Gros poisson du lac

« Une sorte de poisson, d’ailleurs, comme personne n’en n’avait jamais vu : une énorme tête renflée et formant museau dans le bout, la gueule ouverte montrant de longues dents pareilles à des aiguilles à tricoter ; des yeux grands comme des assiettes, et le dos singulièrement épineux, hérissé, offrant aux regards une matière de la nature du tuf et comme taillé au couteau. »

C. F. Ramuz : Le Gros poisson du lac, Éditions Séquences, 1992

ISBN 2-907156-20-9, extrait p. 29.

"Cette nouvelle peu connue de C. F. Ramuz, écrite entre le 9 et le 12 juillet 1914, avait été publiée en première édition par les Éditions Séquences dans le cadre de la « Collection ramuzienne » animée par Jean-Louis Pierre, avec l’accord de Marianne Olivieri-Ramuz en avril 1992, il y a trente années déjà.

Cinq années plus tard, le 19 mai 1997, l’équipe de rédaction de la revue culturelle ESPACES (1975-2000) faisait don à la Fondation d’un tableau avec un bois flottant illustrant particulièrement le « dos singulièrement épineux » de cet étrange poisson. Cette nouvelle est suivie d’une postface remarquable de Gérald Froidevaux (1934-2020)."

Voir, avec le lien fourni au début, la photo historique...

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Pour mémoire :
Edité en 1992

L'édition réservée aux Amis de Ramuz (200 ex. numérotés) était tirée sur Ingrid bleu clair...

Tout un programme !




Mais il ne faut pas oublier de préciser que ce texte a été repris pas les éditions Du Lérot :

Edité en 2012


dimanche 16 mai 2021

Pour "Une Main" traduit en allemand en 1934 ("Eine Hand"), le dessin de couverture de Walter Diggelmann

Nous remercions M. André Durussel pour l'image de couverture de Eine hand, en 1934, et son rappel de l'histoire du texte : 

A la mi-janvier 1931, Ramuz fait une chute sur le verglas en dessous de La Muette et se brise l'humérus gauche. Il évoque tout cela durant son immobilité et publie ces pages dans la revue Aujourd'hui du 12 mars déjà, et jusqu'au 16 avril. 

Une Main sera édité chez Grasset deux années plus tard (1933), puis dans les Œuvres complètes de Mermod (1940-1941). 

En 1934, une traduction en langue allemande (Eine Hand) de Werner Joh. Guggenheim est publiée chez Rachler & Cie AG, Verlag à Zürich, Leipzig et Stuttgart, avec un dessin de couverture signé Walter Diggelmann.

Edition allemande de Une main en1934
illustration de Walter Diggelmann

C'est cette illustration que nous reproduisons aujourd'hui pour les Amis de Ramuz.
En souvenir aussi de Philippe Renaud, qui avait publié une remarquable postface à "Une Main" aux Editions Séquences en 1997.

André Durussel
En 2009, réédition du texte
par Du Lérot Editeur 
 avec la postface de Philippe Renaud
intitulée "De la chute à l'envol"

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contact avec l'association :


samedi 18 mai 2019

"C. F. Ramuz, Sentir vivre et battre le mot", nouvel ouvrage de Stéphane Pétermann, présenté par André Durussel.

Stéphane Pétermann,
C. F. Ramuz. Sentir vivre et battre le mot,
Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes,
coll. « Savoir suisse », 2019.
4e de couverture :
N’a-t-on pas tout dit de C. F. Ramuz (1878-1947), tout publié de cet écrivain par ailleurs monumentalisé et largement instrumentalisé ? L’identification de la littérature romande à son œuvre n’a-t-elle pas desservi l’une comme l’autre ? Désormais entrés dans le domaine public, ses romans sont des classiques, aussi admirés que mal compris.
En s’appuyant sur les apports de l’édition des Œuvres complètes (Slatkine, 2005-2013), l’ouvrage de Stéphane Pétermann (Centre des littératures en Suisse romande) fait le pari de réévaluer le parcours d’un homme devenu écrivain jusqu’à faire corps avec sa production. Un créateur mélancolique qui ne vit que d’écriture, et dont la plume sonde avec une élégance altière le tragique humain.
Sommaire
  • 1 Ramuz revisité
  • 2 De Charles Ramuz à C. F. Ramuz
  • 3 Ramuz et la tradition littéraire romande
  • 4 Vivre de son travail
  • 5 L’écrivain à l’ouvrage
  • 6 Mettre en oeuvre le tragique
  • 7 La somme de tous les malentendus
  • 8 Le doute
  • 9 Notre Ramuz
  • 10 Un classique
  • Repères chronologiques
  • Bibliographie 
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 Présentation et commentaire de M. André Durussel, 
(qui nous a informés de la parution de ce livre 
et que nous remercions bien vivement) : 


"Un nouvel ouvrage autour de la vie et de l'œuvre de C. F. Ramuz (1)"

            On a déjà beaucoup écrit et dit autour de cet auteur suisse d'expression française (1878-1947), diffusé en France à partir des années 1920, lorsque l'éditeur Grasset commence à publier ses textes et ses anciens romans sur la base d'un premier contrat en 1924, puis d'un second en 1939, tandis qu'il est déjà connu en Suisse francophone dès 1903-1904 avec Le Petit Village, puis Aline en particulier. Mais c'est surtout à partir de 1947 que la réception de son œuvre va connaître une nouvelle phase, un véritable culte rendu à C. F. Ramuz, ce grand auteur du Canton de Vaud, et du Valais en particulier.
         Ce nouvel ouvrage grand public de Stéphane Pétermann (UNIL,160 pages), est fort bien structuré en une dizaine de chapitres. Il porte un regard neuf sur le texte ramuzien lui-même et rappelle quelques éléments biographiques, parfois voilés par la légende, la manière solitaire de "Vivre de son travail" en éternel insatisfait, les malentendus inhérents au succès de cette œuvre, Ramuz ayant le souci permanent de ne pas se laisser instrumentaliser sur la question de l'appartenance politique ou idéologique. (2)
          Les chapitres 9 et 10, parmi les plus novateurs, tentent de montrer comment s'est mise en place la canonisation de l'interprétation, et de renverser la statue actuelle de ce "saint laïque" pour mieux s'attacher à l'œuvre elle-même, ainsi débarrassée de ses vernis successifs. Comme le pratiquait Ramuz lui-même en son temps, une partie de ces pages a été publiée initialement en revue. Voir à ce sujet: Pétermann Stéphane, Ramuz paysan, patriote et héros : construction d'un mythe, Revue "A contrario", vol.4, No 2, 2006, p. 36 à 56.

            Quelques remarques au cours d'une première lecture:

1.   Concernant les éléments biographiques qui ont accompagné le jeune Charles Ferdinand dès sa naissance, l'auteur ne s'attarde pas sur ce double prénom, rappel des prénoms de frères morts avant sa naissance (p. 16). Ramuz, en plaisantant, se désignait avec "un prénom d'archiduc". Jean-Louis Pierre, auteur d'une thèse intitulée Identités de C. F. Ramuz (Artois Presses Université, 2011), évoquant le caractère saturnien de Ramuz, va plus loin et parle d'un "héritage mortifère" imposé par le père.
2.     La disparition de ce père, Émile Ramuz, le 16 avril 1910, marque un profond tournant dans la vie du jeune Ramuz, alors âgé de trente-deux ans. Ces pages consacrées à la vie de famille, ainsi qu'au mariage de l'écrivain avec Cécile Cellier (1872-1954) sont importantes. Elles contribuent à faire mieux connaître ce rôle de chef de famille que Ramuz va endosser (p. 29 à 33). 
3.      Le chapitre cinquième: "L'écrivain à l'ouvrage" (p. 67 à 75) évoque magistralement l'activité quasi artisanale (style, méthode, discipline ritualisée et rigoureuse, etc.) de celui qui se laissait guider par les mots. (p. 70).
4.     Le chapitre 9 relate, avec beaucoup de détails, comment Ramuz est devenu un véritable monument à partir des années 1950, ceci jusqu'à l'aube de cette Nouvelle littérature romande promue en particulier par Bertil Galland et Jacques Chessex, l'événement majeur étant bien celui de la création d'une Fondation C. F. Ramuz en décembre 1950 (p. 133 à 135). [L’auteur ne signale pas ici la démission, en 2017, du Président du Conseil de direction de ladite Fondation, suite à la polémique lancée au sujet de la restauration de "La Muette", cette maison vigneronne au cœur de Pully où Ramuz a vécu de mai 1930 à sa mort]. Trente années après la création de cette Fondation qui s'arrête à la frontière suisse, c'est la constitution, en France, d'une "Association des Amis de Ramuz", à Tours, qui rassemble un important fonds documentaire concernant l'œuvre de Ramuz. Mais elle n'est pas citée par Stéphane Pétermann.                                                                
5.     Au sujet de ce "saint laïque" et de "l'absence à ce jour d'une biographie véritablement scientifique" (p. 146), il est regrettable que l'auteur ne mentionne pas l'épais ouvrage d'André Tissot : C. F. Ramuz ou le drame de la poésie, publié à la Baconnière en 1948 déjà. Cette étude n'était-elle pas assez scientifique ? De même, comme nous l'avons dit plus haut, la thèse de Jean-Louis Pierre, intitulée Identités de C. F. Ramuz (que le président honoraire des Amis de Ramuz à Tours a publiée chez Artois Presses Université en 2011), est passée sous silence. Mais il s'agit probablement là d'une décision du Comité d'édition de cette collection "Savoir suisse" aux Presses polytechniques et universitaires romandes, qui doit, comme son nom l'indique, se limiter à la Suisse.
6.    Au sujet des mythes et de la sanctification de son œuvre, Ramuz y a lui-même aussi contribué, comme d'ailleurs sa "Petite sœur", Berthe Buchet-Ramuz (1896-1994). On relira par exemple autour de ce sujet les textes marquant le centenaire de la naissance de C. F. Ramuz, rassemblés et introduits par Gérard Buchet (1914-2003) sous le titre: Des saints et des sages. (Ides et Calendes, Neuchâtel, 1978).
7.   En résumé, et pour conclure les quelques notes de cette première lecture, la position de l'anthropologue Claude Lévi-Strauss (1908-2009) me paraît répondre aux questions soulevées par Stéphane Pétermann dans son intéressant ouvrage :   

"Nous ne prétendons pas montrer comment les hommes pensent dans les mythes, mais comment les mythes se pensent dans les hommes, et à leur insu."                                       
     (Le cru et le cuit, 1964)


                                                                                                          André Durussel© 
                                                                                                          07.05.2019
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1) Pétermann Stéphane, C. F. Ramuz, Sentir vivre et battre le mot, Éd. Presses polytechniques et universitaires romandes (PPUR), 2019, Collection Savoir suisse. ISBN 978-2-88915-303-9
2) Pétermann Stéphane, Ramuz anarchiste de droite. Contribution au 5ème colloque (2014) organisé par les Amis de Ramuz à l'Université François-Rabelais, F-37041 Tours.

mercredi 2 janvier 2019

André Durussel : quelques pages de "Vives clartés", à paraître en 2019

Voici une référence de lecture que nous propose un membre de notre association :

"Choisir vous propose en marge de son édition 690, qui porte notamment sur la notion du "chez soi", un extrait remanié de Vives clartés d'André Durussel (à paraître en 2019). 
Le poète et essayiste vaudois évoque ici la vision de l'enracinement de différentes figures de la littérature, avant de donner la sienne à travers le récit de trois maisons qui ont contribué à forger son identité d'homme et d'auteur romand.
Voir le site :

 Un texte qui nous mène de La Vallée de Joux à Tolochenaz, en passant par La Rippe. Un pays de Vaud au siècle dernier qu'il dépeint avec tendresse."

Khalil Gibran, Simone Weil, Ramuz, 
 Mauriac, J.-P. Monnier et André Durussel.

EXTRAITS :
Dans son célèbre ouvrage intitulé Le Prophète (édit. Castermannn, 1956, p.32), l'écrivain libanais Khalil Gibran (1883-1931) écrivait ceci: « Ô si je pouvais cueillir vos maisons et, comme un semeur, les éparpiller dans les forêts et les prés ! »
Quelques pages plus loin, il ajoute ces recommandations essentielles, vibrantes de ce lyrisme avec lequel il s'exprimait :
« Vous n'habiterez pas des tombes construites par des morts pour des vivants. Même faite avec magnificence et splendeur, votre maison ne saurait contenir votre secret, ni abriter votre désir. Car ce qui est infini en vous habite le château du ciel, dont la porte est la brume du matin, et dont les fenêtres sont les chants et les silences de la nuit. »
En effet, malgré l'enracinement légitime d'essence terrienne que la plupart d'entre nous développent et ressentent dans les différentes maisons successives où nous avons résidé (ou résidons actuellement), que cela soit en Suisse ou dans un pays voisin, voire dans un autre continent, elles ne nous appartiennent jamais, étant finalement que prêtées durant notre brève existence. [...]
 ************
Cet enracinement a d'ailleurs fait l'objet d'un long essai de Simone Weil (1909-1943) en guise de Prélude à une déclaration des devoirs envers l'être humain, écrit à Londres en été 1943, peu de temps avant sa mort (éditions Gallimard, 1949) :
« Chaque être vivant a besoin d'avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle et spirituelle par l'intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie. » (Op. cit.p.61)
Après ce bref préambule, dont ses généralités me semblaient nécessaires, il est temps d'évoquer maintenant trois maisons qui, dès ma naissance et jusqu'à mon adolescence, ont ainsi contribué à cet enracinement. Pas nécessairement avec des racines multiples ou exceptionnelles, mais cependant assez profondes et solides pour que se développe harmonieusement un arbrisseau de mon espèce.



La maison isolée des "Douanes-Suisses" aux Charbonnières, à la Vallée de Joux, sur la route conduisant à Mouthe, a été ma première demeure, ceci dès l'automne de l'année 1938 et jusqu'au terme de la seconde guerre mondiale, en mai 1945.

Le paysage linéaire de cette contrée frontière, à la lisière des profondes forêts du Risoud, par son silence vertigineux et l'austérité de son climat, m'a durablement marqué. Quelques peintres ont certes tenté d'exprimer cette sorte de lumière, cette éternité tranquille que des mots sont bien incapables de restituer: Susy Audemars, Léopold Golay et Pierre Cotting, le graveur Pierre Aubert aux Mollards, sur les pentes du Marchairuz, ainsi que Michel Chaperon et Tell Rochat, pour n'en citer ici que quelques-uns. Au sujet de la neige, présente presque six mois sur douze dans cette région et à cette époque, je dois préciser d'emblée que c'est bien d'une présence dont il s'agissait, à la manière d'un véritable personnage. Ces lignes de Jean-Pierre Monnier (1921-1997) expriment parfaitement - dans Écrire en Suisse romande entre le ciel et la nuit (éditions Castella, Albeuve, 1986, p.95, réimpression anastatique des éditions Galland en 1979)- cette étrange emprise :

« La neige a des pouvoirs si péremptoires qu'elle semble rejeter au loin ceux qui s'en accommodent et ceux qui la subissent. Pour les uns, elle agrandit l'espace de leur champ de lecture, et comme pour toute étendue soudain plus vaste et plus dépouillée, mais aussi plus hostile, elle oblige à plus d'efforts dans l'attention, à une écoute plus appliquée, à plus de patience. Pour les autres, elle recouvre des profondeurs impensables où le temps s'est englouti. Elle ranime les images redoutées, celle de l'absence, de l'oubli, du dénuement En limitant le regard à presque rien, elle prive l'être de toute faculté, et même de toute parole. »
[...]
Au pied du Jura
La seconde étape de mon enfance, puis de mon adolescence, au lendemain de la seconde guerre mondiale, s'est déroulée au pied du Jura, dans le village frontière de La Rippe, en dessus de Crassier. Ce furent-là les années du début de ma scolarité, celles aussi d'une première «découverte du monde» à la manière de Ramuz. Une région certes moins austère que celle des Charbonnières, à la Vallée de Joux, mais souvent visitée par un vent séchard, le Joran. Un paysage de pâturages, de haies vives et de cultures céréalières, de fermes cossues et de grands troupeaux appartenant à cette caste d'agriculteurs appelés «amodiateurs» dont l'un des grands représentants, à cette époque, était Armand Melly (1882-1986). Il venait de prendre sa retraite au Conseil national après deux législatures.
[...]
Cette étape à La Rippe s'est achevée en décembre 1951, soit six années plus tard, suite au déplacement temporaire de mon père à un autre poste frontière dans le Chablais, mais sans y entraîner sa famille. [...]

« La Caroline »
La troisième maison qui, durant ma jeunesse, a été temporairement et régulièrement favorable à cet enracinement, c'est cette ferme dite de «La Caroline», située sur le territoire de la commune de Tolochenaz, non loin de Morges, où la famille de ma mère exploitait un domaine à la fois agricole, maraîcher et viticole, admirablement situé au bord du lac Léman. Cette maison représente en effet pour moi un élément absolument central dans cette Découverte du monde selon la belle expression ramuzienne, et cela même si ce «monde» n'était finalement pas très éloigné de celui où je vivais habituellement. Une découverte, non seulement en octobre lors de la période des vendanges, mais à toutes les saisons de l'année.[...] Mon oncle possédait des vignes situées sur le territoire de la commune de Tolochenaz, mais aussi et surtout sur le territoire de la commune voisine de Lully. Ces pages décrites autrefois par Ramuz, alors qu'il avait entre dix et douze ans, devenaient ainsi, et a mon tour, une réalité tangible:
"On était alors tout frais dans la vie; pourquoi ne l'aurait-on pas mieux perçue dans ce qu'elle a d'essentiel ? On touchait encore à sa substance profonde, on n'avait pas encore été séparé de la vérité. O vendanges ! temps des vendanges ! je vous retrouve tout ensemble au fond de moi-même et au fond des siècles."
(Vendanges, éd. du Verseau, Lausanne, 1927)

Je logeais dans une petite maison de jardinier, non loin de la route cantonale, à l'entrée de la vaste cour de la ferme elle-même, attenante à la maison des propriétaires, mais séparée de celle de mon oncle et de sa famille, qui était située plus haut.[...]

Je dormais à l'étage. La fenêtre s'ouvrait sur l'immensité du lac, d'où l'on pouvait observer ce «miroitement des vagues» que Ramuz, toujours lui, évoque dans le premier poème de son Petit village.
[...]
Mais je vais arrêter là ces quelques évocations. Ces maisons «éparpillées» sont, par certains aspects, semblables à ces Maisons fugitives que François Mauriac (1891-1982) décrivait en 1939. Puissent-elles dégager, aujourd'hui encore, un peu de cette même saveur. Une sorte d'éternité inviolable qui rassemble les vivants et les morts dans l'écrin de notre mémoire.
 
André Durussel