mercredi 30 décembre 2020

"La représentation de l'abstrait : la recherche permanente de la forme chez C. F. Ramuz", par Siba Barkataki (New Delhi)

Nous remercions Alexandre Moatti de nous avoir signalé cet article accessible en ligne :


Nous renvoyons, bien sûr à ce lien, et ne proposons ici que le résumé :

 
L'auteure est bien connue de notre association, et le Bulletin n° 41 de 2020 (à paraître) publie précisément un article qu'elle nous a adressé. Signalons la double coquille dans son nom de famille : il s'agit de Siba BARKATAKI.




Que la francophonie, en général, et Ramuz en particulier, intéressent des spécialistes en Inde, voilà une raison de ne pas désespérer tout à fait du monde comme il va...


mercredi 11 novembre 2020

L'apothéose de M. Genevoix (entrée au Panthéon) suggère à Jean-Pierre Sueur un éloge de la Guêpine

Les Amis de Ramuz savent tous que le président fondateur de leur association, désormais président d'honneur, Jean-Louis Pierre, a une petite maison d'éditions (la Guêpine) dont nous parlons régulièrement sur ce blog, au fil des publications, puisque les amis de nos amis sont nos amis !

L'événement de ce 11 novembre étant l'entrée de Maurice Genevoix au Panthéon, nous avons le plaisir de relayer, pour le dernier volume de la Guêpine, l'éloge rédigé par le Sénateur Jean Pierre Sueur, sur son blog :

https://www.jpsueur.com/index.php?option=com_content&view=article&id=12377:maurice-genevoix-la-mort-de-pres&catid=51&Itemid=64

Voici le début de cet article, pour vous donner envie de lire la suite, si vous n'avez pas encore ouvert le lien...

(cliquer sur l'image pour l'agrandir)









Jean-Pierre Sueur







Maurice Genevoix




Réédition, chez Omnibus et dans leur forme définitive, des récits de guerre de Maurice Genevoix dont Norton Cru, pourtant très exigeant sur ce chapitre, disait : "Parmi les auteurs de la guerre, Genevoix occupe incontestablement la première place."

Préface de Jean-Jacques Becker.

dimanche 8 novembre 2020

"Ramuz, le maître", article de Thierry Clermont dans "Le Figaro littéraire" du 5 nov. 2020

A propos de Posés les uns à côté des autres, Zoé Poche, 2020, 292 p.

Ramuz, le maître

 On ne maudira jamais assez la cruauté de la postérité. Le grand Charles Ferdinand Ramuz en est une des plus tristes illustrations. Saluons donc la maison Zoé qui poursuit la réédition en poche de son œuvre de subtil prosateur, quinze ans après son entrée dans « La Pléiade ».  Cette fois, c’est un roman sur la séparation, écrit au soir de sa vie, en 1943,  qui nous plonge dans l’univers rural de sa bourgade de Pully, dans le canton de Vaud entre lac et montagne, avec sa placette, véritable « chambre à ciel ouvert ».

Au centre de cette succession de scènes, le personnage d’Adrienne Parisod, et la traversée des apparences, des drames. De son temps, Ramuz fut salué par Giono, admiré par Zweig qui louait « la banalité du quotidien transfigurée, éternisée par l’intensité de l’artiste. Et puis le don de rendre la simplicité sublime et le sublime simple […] cet équilibre entre l’art raffiné et la forme primitive. »

À l’heure où abondent les romans frelatés sur un idyllique « retour à la terre », voilà un retour aux sources bien salutaire.

Thierry Clermont, Le Figaro littéraire, 5 novembre  2020, p. 6


Parution le 10 novembre.

En complément, nous donnons les informations présentes sur le site de l'éditeur :

"Inédit du vivant de Ramuz, Posés les uns à côté des autres est son roman le plus personnel. Il y dépeint les voisins de son village, qui s’y entrecroisent sans qu’ils se comprennent ni se connaissent jamais. Cette séparation des êtres entre eux, « posés les uns à côté des autres », est à l’origine de la solitude tragique des personnages ramuziens. Elle contraste ici avec la beauté bouleversante du lac et de la montagne."

Introduction de Rudolf Mahrer

***

Mise à jour du 31 décembre 2020 :

Le Monde des Livres signale la parution de ce roman de Ramuz chez Zoé, en p. 4.

Un pas de plus vers la consécration ? (question oratoire).

jeudi 5 novembre 2020

La collection "Zoé Poche" fait parler de Ramuz...

 Nous remercions Alexandre Moatti qui nous a signalé ce lien:

https://www.en-attendant-nadeau.fr/2020/11/04/vie-poches-1-ramuz/

Voici le début de l'article :

"Ramuzez-vous"

par Cécile Dutheil de la Rochère (4 novembre 2020)

La vie dans les poches (1)

Pour sa première chronique dédiée aux livres petit format, rééditions tardives ou précoces d’écrivains du passé ou du présent, En attendant Nadeau lit quatre livres d’un grand écrivain suisse et vaudois qui reste injustement méconnu en France : Charles Ferdinand Ramuz.

Charles Ferdinand Ramuz, Une mainLes Signes parmi nousAlineParis (notes d’un Vaudois). Zoé, coll. « Zoé Poche », de 90 à 216 p., de 8 à 10 €

 


Charles-Ferdinand Ramuz, photo Henry-Louis Mermod

 © Centre de recherches sur les lettres romandes (UNIL)

Nous vous laissons découvrir la suite de cet article sur le site indiqué ci-dessus.

mardi 6 octobre 2020

Le prochain Colloque Ramuz enfin annoncé sur Fabula (à Sion, 22-23 septembre 2021)


Les Amis de Ramuz (France) sont heureux de vous faire part 
des lieux et dates du prochain Colloque Ramuz
 

"[Le colloque] se tiendra aux Arsenaux, à Sion (Valais), en Suisse, les mercredi 22 et jeudi 23 septembre 2021.

Ce colloque précédera immédiatement le «Festival du Livre Suisse» organisé par «La Médiathèque Valais–Sion» et la «Fondation pour l’Écrit» au même endroit du 24 au 26 septembre. Des collaborations seront proposées pendant et après le colloque avec les invités et le public du Festival ainsi qu'avec des étudiant·e·s de l’enseignement secondaire."

[...]

COMITÉ D'ORGANISATION

Noël Cordonier, Président de la Fondation C. F. Ramuz

Christian Morzewski, Professeur émérite de l'Université d'Artois

Jean-Louis Pierre, Enseignant retraité de l'Université de Tours

Dylan Roth, Secrétaire de la Fondation C. F. Ramuz


 Pour les pistes d'études et les appels à contribution, voir le lien :

https://www.fabula.org/actualites/ramuz-et-la-nature-perceptions-et-interdependances_98135.php

Les spécialistes et les amateurs apprécieront...

Les Arsenaux


Vue générale de Sion



lundi 31 août 2020

Salon du livre de montagne de Passy (74), rétrospective des affiches !

 Le salon de Passy, que nous recommandons chaque année à nos lecteurs, en précisant que Jean-Louis Pierre y est présent avec des livres de Ramuz, n'a, hélas, pas pu se tenir en août sous sa forme habituelle, pour des raisons que tous comprendront aisément.

Cependant nous indiquons le lien du site qui évoque les activités de l'été, telles que les amateurs ont pu les trouver en décidant de s'y rendre... ainsi que l'historique du Salon :

https://salonlivremontagnepassy.jimdofree.com/%C3%A0-propos-de-nous-historique-du-salon/

L'intérêt de donner ce lien aujourd'hui est la collection d'affiches depuis la création du Salon qui est fournie en diaporama (en bas du bandeau de gauche). Les arrêts sur image sont possibles!

Nous proposons une petite série d'exemples :





dimanche 9 août 2020

Insolite : le "Florilège savoyard" de Ramuz traduit en... patois savoyard !

 

 

NB : ce travail ne bénéficie que d'un tirage confidentiel.

Toutefois, Roger Viret, l'auteur de cette traduction, propose sur Internet un Dictionnaire "Français-Savoyard" très érudit, avec le lien suivant :

 https://www.les-amis-de-pralognan.com/imagelaurent/documents/DictionnaireFrancaisSavoyard.pdf

Bonne découverte !

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Voici toutefois le début de la traduction de la préface...


mercredi 5 août 2020

Article du "Temps" : Francis Reusser monte à Derborence

Sur le site du journal Le Temps :

Article d'antoine Duplan (31 juillet 2020)

Francis Reusser monte à Derborence

"Enfant de Mai 68, Francis Reusser fait sensation en proposant une relecture lumineuse du Derborence de Ramuz. Métaphysique, épique et sensuel, ce western alpin réconcilie une génération avec l’écrivain vaudois et les paysages helvétiques."

Séraphin (Bruno Cremer) et Antoine (Jacques Penot) face à la montagne toute puissante...(Copyright JMH Distribution)


"Mai 68 a fait une victime collatérale: Charles Ferdinand Ramuz. Le plus grand écrivain suisse d’expression française a été excommunié pour collusion avec le système, dénoncé comme chantre réactionnaire d’un terroir confit dans ses certitudes. Au mitan des années 1980, Francis Reusser met fin à ce fourvoiement idéologique en portant Derborence à l’écran.

La surprise est grande, car le cinéaste, né à Vevey en 1942, est un révolté dont les films, Vive la mort, Le Grand Soir, Seuls, abordent les espérances et les désillusions de 68. Il ne connaissait pas Ramuz. Il ne voyait que « l’institution, fabriquée par les notables, par l’État ». Il a découvert l’écrivain par hasard, à Derborence, dans une bibliothèque de chalet. Et Ramuz lui est apparu « d’une modernité formidable. Il n’est pas celui qu’on pense: c’est un écrivain subversif, cruel, un misogyne, un entomologiste d’une méchanceté formidable. Un poète, un métaphysicien, tout le contraire du terroir ! »

Le cinéaste s’inscrit en faux contre la « formidable mauvaise conscience des intellectuels et des artistes », se démarque « du discours dépressif des intellectuels. Tanner tourne No Man’s Land ? Je réponds « Our land », je tourne Derborence ». Ces prises de position valent au cinéaste quelques volées de bois vert de la part de ses camarades et de la critique alémanique qui tend à voir dans cette tragédie alpine un retour du Heimatfilm honni."

[Lire la suite sur le site indiqué...]

Isabelle Otero, longtemps avant d'être "femme flic" à la TV...

jeudi 25 juin 2020

"Florifège savoyard", 5 textes de Ramuz, nouvelle publication de La Guêpine












Nous recommandons donc chaleureusement ce volume, et, dans ce volume, les deux premiers textes (Un coin de Savoie et Le Voyage en Savoie), qui manifestent, pour le premier, le sérieux de l'exploration (celui du Village dans la montagne par exemple) et, pour le second, l'humour et la fantaisie des souvenirs de jeunesse !
Un régal pour les amateurs, mais aussi pour les lecteurs qui découvrent cet écrivain !

Contact avec l'éditeur :
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Nb : les lecteurs de ce blog qui apprécient 
les publications de la Guêpine
seront heureux de découvrir un autre volume,
 dans un tout autre registre :




mardi 12 mai 2020

"RAMUZ, L'écriture comme absolu", récente publication de Spéphane Pétermann.


Présentation empruntée au site de l'éditeur :

"Tout le monde croit connaître le plus célèbre des Vaudois. Mais qu’est-ce qui constitue le cœur du projet littéraire de C. F. Ramuz (1878-1947) ? La passion de l’absolu, qui anime chez lui le besoin ardent de découvrir, en l’Homme, ce qui demeure, sous ce qui passe. Derrière le dandy distant et sûr de lui, toisant ses lecteurs, se cache un homme fébrile qui ne songe qu’à l’élémentaire, l’universel, la beauté, la grandeur, la plénitude, la permanence, autres noms de l’être et d’un absolu dont il éprouve une nostalgie sans fin. Si Ramuz a passé sa vie à bâtir un univers clos sur lui-même, n’est-ce pas parce qu’il y voyait le seul substitut à sa portée d’une unité irrémédiablement perdue ? « Asseoir l’objet passager dans l’éternité », note-t-il dans son Journal en 1943. Ramuz, ou l’écriture en quête d’immortalité…"


"Stéphane Pétermann est responsable de recherche au Centre des littératures en Suisse romande (UNIL), où il contribue en particulier à l’édition de textes littéraires. Ses recherches portent sur l’histoire de la littérature romande, la patrimonialisation, la genèse des textes et l’histoire éditoriale. Spécialiste de C. F. Ramuz, il est l’auteur de nombreuses études, et a édité des correspondances, journaux intimes et romans allant de Jacques Chessex à Guy de Pourtalès, de Nicolas Bouvier à Gustave Roud, de C. F. Ramuz à Monique Saint-Hélier. Aux éditions Infolio, il a publié un excellent cippe consacré à Ramuz (La Beauté sur la terre de Charles Ferdinand Ramuz, coll. Le cippe, 2010, avec Daniel Maggetti) et vient de publier C. F. Ramuz. Sentir vivre et battre le mot (PPUR, coll. Le Savoir suisse)."  


"La nouvelle collection Presto
La collection Presto remet dans la lumière des personnages ou des thèmes suisses, illustres ou méconnus. Son ambition ? Offrir la synthèse la plus efficace possible (d’où le nom de la collection) sur les sujets les plus divers, mais en visant le public le plus large possible. Tous les titres ne compteront que 64 pages, avec les illustrations."

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Et parmi ces illustrations, notre "coup de cœur" :


+La Guérison des maladies+

[Texte de l'affiche :]
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"TRAITEMENT RADICAL DE L'INSOMNIE PAR LA SUPPRESSION DE LA SYNTAXE.

NOMBREUSES ATTESTATIONS"
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et coup de chapeau à ce petit bijou de l'édition, d'où est tiré cette page sur Ramuz :
Couverture du livre d'Henri Guilac
PROCHAINEMENT OUVERTURE...
DE 62 BOUTIQUES LITT2RAIRES
L'illustrateur a choisi de représenter, sous la forme d'une boutique dont l’enseigne est le titre d'un livre, 62 ouvrages de l925, avec à chaque fois le "portrait" de l'auteur.
 Pour mémoire, un autre exemple, 
avec le livre de Claudel :


mardi 21 avril 2020

" Télérama" parle du livre d'A. Moatti sur le transhumanisme !

Nous avons, dans un message récent du blog, signalé la parution du livre d'Alexandre Moatti, Aux origine du transhumanisme. Nous avons le plaisir de voir que la Lettre de Télérama de ce jour (21-04-2022) évoque cet ouvrage :

"L’idée d’un homme supérieur court depuis le début du XIXe siècle. Mais, selon l’historien Alexandre Moatti, auteur d’Aux origines du transhumanisme, cette idéologie qui consiste à croire qu’on peut améliorer « les capacités humaines par la science et la technologie » n’est en fait qu’un idéal cynique« Le transhumanisme va au-delà de l’eugénisme tel qu’on le concevait dans les années 1930, et qui se voulait une théorie scientifique prétendant à l’amélioration collective de l’humanité par la sélection des naissances, résume Alexandre Moatti. Le transhumanisme, lui, en dénigrant les “inutiles”, combine une forme d’eugénisme qui ne dit pas son nom à une vision néolibérale exacerbée du monde. Il enjoint chacun à devenir “entrepreneur de soi-même” au mépris de toute forme, voire de toute idée de solidarité entre humains. »"

De fait, l'hebdomadaire publie un article de trois pages (pp 29-31) à cet ouvrage, qui est un entretien de Xavier de Jarcy avec l'auteur.





Les illustrations sont signées Sébastien Plassard pour Télérama,
 mais nous invitons les lecteurs à découvrir sur Internet
 des portraits d'A. Moatti plus flatteurs que l'image "trafiquée"
qui est proposée en p. 31., et que nous renonçons à reproduire ici !









dimanche 12 avril 2020

"Chant de Pâques", petit retour sur le texte de Ramuz.


Ecrit pour son petit-fils, que Ramuz surnomme "Monsieur Paul", ce texte (de 1944 ?) entraîne l'enfant au jardin pour une observation de la résurrection du monde, au printemps :

"Regarde, écoute et puis aspire, car tout l'être est sollicité : il y a ces plantes qui poussent hâtivement dans les fissures des vieux murs ; […] Et tous ces bourgeons lustrés s'exhalent, ayant avant les fleurs leur langage qui ne s'entend pas, mais qui est quand même par nous intimement perçu. Passe ta langue sur ta lèvre; elle est toute collante d'une espèce de miel ; respire la paume de ta main qui est verte : c'est la sève, la grande circulation qui est dans les troncs, dans les moindres tiges, qui raidit les germes sous terre et qui fait qu'ils percent la terre comme le menuisier une planche de son foret. Et que s'ils rencontrent une pierre, ils la déplacent, un quartier de roc, ils le fendent: frêles et faibles, tellement faibles, plus forts que tout. C'est qu'ils sont appelés au jour. La suscitation du désir est en eux. Tout est suscité, tout ressuscite, tout recommence."

Ramuz au jardin, avec Monsieur Paul...
Dans la postface de l'édition de 1993 (publiée par Séquences), Adrien Pasquali donnait à ce texte un statut exceptionnel :

"Chant de Pâques est un texte de résurrection, hors du tombeau où le langage prend son origine insituable. Texte court, éminemment singulier, ces pages ne sont pas du "Ramuz" des Œuvres complètes : parole de médiation et de révélation, parole d'inspiration et d'expérience, elle travaille certes avec des modèles élaborés par tout l'œuvre antérieur, mais elle s'en démarque radicalement par l'intention. [...] En quelques pages, nous tenons là une totalité d'un autre ordre, qui serait à elle seule comme l'autre versant de tout l'œuvre antérieur. [...] il paraît moins provocateur que stimulant de penser à l'esquisse d'un second volet d'"oeuvre complète", tout entier dans ces pages."


Rappelons que ce texte est désormais disponible
 dans la réédition de La Guêpine, 
avec une préface de Jean-Louis Pierre :




Renseignement et commandes : 



samedi 11 avril 2020

Souvenir d'une épidémie dans "Les Signes parmi nous" de Ramuz : article du "Temps", 11 avril 2020

"Quand l’épidémie inspirait Ramuz"

Le Temps,11 avril 2020, 
article de JULIEN BURRI



(Classic Image/Alamy Stock Photo)

En 1919, Charles Ferdinand Ramuz imaginait, dans Les Signes parmi nous, une épidémie qui décimait la Suisse romande. Avec Daniel Maggetti, directeur du Centre des littératures en Suisse romande, retour sur un livre phare qui sonne aujourd’hui comme un appel à rester confiants.

Fausses nouvelles et théories du complot, hommes foudroyés, angoisse galopante… 

Le roman Les Signes parmi nous, que Charles Ferdinand Ramuz publie en 1919, raconte déjà une épidémie et ses conséquences en Suisse romande. Le colporteur Caille parcourt les villages pour annoncer la fin du monde et certains croient au début de l’apocalypse. Daniel Maggetti, professeur à l’Université de Lausanne et directeur du Centre des littératures en Suisse romande, revient sur ce chef-d'œuvre visionnaire, écrit alors que sévissait la grippe espagnole et que venait de prendre fin la Première Guerre mondiale.
Les Signes parmi nous entre en écho avec la situation que nous vivons. Comment relisez-vous ce livre aujourd’hui ? C’est troublant. Malgré l’arsenal mis à notre disposition pour comprendre et disséquer la crise, nous nous retrouvons aussi démunis que les personnages qu’inventait Ramuz. […]. La société a évolué, la médecine a progressé… mais les conséquences matérielles, pratiques, des mesures qui sont prises fragilisent tout autant les individus qu’il y a cent ans.
Les personnages des Signes parmi nous cherchent à donner un sens au mal qui frappe la société dans laquelle ils vivent. Quel est le message de ce roman ? Les personnages essaient de répondre à la brutalité des morts qui se multiplient en tentant de leur trouver une explication. Les Signes parmi nous raconte le conflit des interprétations possibles. Le texte fait largement écho à l’apocalypse biblique, mais Ramuz se distancie de la lecture littérale de la Bible : elle apparaît comme un point de vue sur le monde, parmi d’autres, et n’a pas un statut de vérité.
Il est humain, lorsque des événements nous affectent, de chercher à les interpréter en les inscrivant dans une vision globale. Nous y répondons tous de façons différentes, parfois en passant à côté de la vérité, parfois en tombant juste.[…]
La possibilité de l’effondrement généralisé fascinait-elle Ramuz ? Dans son roman Présence de la mort, en 1922, plus apocalyptique encore, le Soleil se rapproche de la Terre. C’est une fin du monde programmée, presque de la science-fiction, avec la mise en scène d’une série de drames symptomatiques de la destruction du vivre-ensemble. La Guérison des maladies (1917) et Le Règne de l’esprit malin (1914) étaient davantage liés à des événements surnaturels d’ordre mystique. Dans le premier, une jeune fille possède des pouvoirs thaumaturgiques ; dans le second, une incarnation du diable arrive dans un village. Le point commun entre ces textes, c’est qu’ils explorent ce qui se passe lorsqu’une société est bouleversée et menacée. […]
[Ramuz] a-t-il été personnellement touché par l’épidémie de grippe espagnole ?
Marguerite Bovon, l’épouse de son frère, à laquelle il était très lié, meurt à la suite de la maladie. Rappelons aussi que l’Histoire du soldat, fruit de sa collaboration avec Stravinsky, n’est jouée qu’une fois: à cause de l’épidémie, le théâtre ferme après la première représentation, le 28 septembre 1918. Cela évoque la situation de nos théâtres aujourd’hui…
La peur et les menaces invisibles semblent un thème majeur chez lui…
Ramuz est très sensible à l’angoisse de la finitude, oui. Il ne croit pas à une vie après la mort, et les circonstances d’une épidémie augmentent la crainte de voir la fin arriver. Il montre à quel point les hommes sont démunis face à ce sentiment, quels que soient leur milieu social ou leur expérience… Il y revient dans des œuvres plus tardives, comme La Grande Peur dans la montagne, où le confinement touche un alpage maudit, Derborence, qui raconte une catastrophe naturelle, ou Si le soleil ne revenait pas, qui met en scène la crainte de la fin du monde dans un village valaisan.
Pourquoi Les Signes parmi nous paraît-il toujours novateur, un siècle plus tard ? Ramuz transforme la manière de concevoir et de composer un roman. Il ne procède pas selon une narration traditionnelle et linéaire, mais juxtapose des scènes, des "tableaux"; il use de l’ellipse, s’intéresse à la simultanéité des perceptions entre tous ses personnages. Le lecteur ne suit pas un héros mais découvre une société, de l’ouvrier au notable, du vagabond au paysan… Tout le monde est confronté à la peur et à la mort.
En 1905, Ramuz disait que le roman devait être un poème. Avec Les Signes parmi nous, il manifeste de nouveau sa volonté de décloisonner les genres, et accentue certains traits heurtés de son style.
Au cœur de la catastrophe que raconte Ramuz, la nature est très présente et commence à "parler" aux hommes…
En effet, le roman dépeint une relation particulière de l’homme à la nature, au moment où le monde semble basculer. Salutation paysanne, deux ans plus tard, mettra aussi en évidence le rapport d’échange et de perméabilité entre les éléments naturels et les hommes. On songe parfois à une sorte d’"animisme", même si ce terme n’appartient pas au lexique ramuzien. L’univers est doté d’une force première de vie qui se communique aux hommes, et il y a un échange vital entre eux et lui.
A la fin, la crise s’avère aussi passagère qu’un orage. Ramuz nous invite-t-il à rester confiants ? Le livre se termine sur le rendez-vous d’un couple d’amoureux, qui apparaît comme une marque d’espoir chez un auteur par ailleurs peu optimiste! Il reste une lueur, la catastrophe était une parenthèse, et non la destruction finale de l’humanité. ■

Les Signes parmi nous est paru en poche chez Zoé en novembre 2019.










Nous remercions Philippe de Koster pour nous avoir fourni ce document.

vendredi 10 avril 2020

Le cinéaste suisse Francis REUSSER nous a quittés. Il a porté Ramuz à l'écran plusieurs fois !

La Guerre dans le Haut-Pays


La Séparation des traces

Le journal suisse Le Temps annonce le décès du cinéaste et lui rend hommage, avec un article d'Antoine Duplan :

https://www.letemps.ch/culture/francis-reusser-deces-dun-eternel-rebelle

EXTRAITS :
Francis Reusser, décès d’un éternel rebelle




"Enfant de mai 1968, le cinéaste veveysan a témoigné des bouleversements idéologiques de son temps, s’est battu sans jamais fléchir contre les injustices et a su exprimer le génie de la terre romande. C’est une belle figure qui disparaît."
 "Il avait en lui une colère que les années n’ont jamais vraiment éteinte, même si, avec le temps, il a fini par s’apaiser, reniant les bistrots où l’on refait le monde jusqu’au bout de la nuit pour renouer avec les paysages lémaniques de son enfance et la culture patrimoniale. Né à Vevey, le 1er janvier 1942, Francis Reusser a été figurant à la Fête des Vignerons en 1955 et placé en institution suite à quelques frasques adolescentes. Il a fait une formation de photographe et travaillé à la Télévisions suisse romande où il chipait des bouts de pellicule pour se livrer à des premières expériences cinématographiques.
 Plus jeune d’une dizaine d’années que Tanner, Soutter et Goretta, les fondateurs du nouveau cinéma suisse, Francis Reusser est le plus emblématique de l’esprit de 68. Ses premiers films témoignent de l’ébullition contestataire de la fin des années 60. Sélectionné lors de la première Quinzaine des réalisateurs à Cannes, en 1969, Vive la mort, son premier long métrage, suit deux amoureux en rupture de ban, raille les institutions suisses, critique la société de consommation et dénonce le sexisme. Forcément vieilli, ce manifeste plein de sève fait entendre la musique d’une époque et révèle un tempérament batailleur.
 [...] Vieux lion
Au mitan des années 80, Francis le gauchiste crée la surprise quand il adapte en scope Derborence de Ramuz. Mal lu, l’écrivain vaudois est à l’époque considéré comme réactionnaire. Le cinéaste remet les pendules à l’heure : "Ramuz n’est définitivement pas un écrivain patriotique et patoisant, mais un pessimiste fondamental. Il creuse en profondeur, inscrivant dans sa terre natale des drames qui tendent à l’universel plutôt qu’au national."
 L’intelligentsia alémanique insulte l’adaptation, qu’elle qualifie de "Heimatfilm". Francis Reusser passe pour un vendu, un "marchand de soupe". Pus tard, il en rigolait : "Nous, les enfants du western, trouvons un souffle épique chez Ramuz. Il a été le premier écrivain qui nous permette d’aller dans la nature à l’époque où tout le monde filmait son coin de rue. Dans les années 70, on ne voulait pas du pessimisme de Ramuz. Qu’est-ce qu’on a pas déconné sur l’avenir radieux de la société ! En fait, ce sont ceux qui dépeignaient le cauchemar qui avaient raison." En 1998, il porte à l’écran un autre roman de Ramuz, La Guerre dans le Haut Pays.
 Pugnace, Francis Reusser n’a jamais cessé de lutter contre les injustices et les autorités fédérales. Il signe Voltaire et l’affaire Calas. Il suit une chorale suisse dans sa tournée en Palestine (La Terre promise). Lorsqu’à plusieurs reprises l’Office Fédéral de la Culture refuse de subventionner son projet d’adaptation de La Trinité, de Jacques Chessex, il se bat comme un vieux lion, monte sans peur ni reproche au créneau, traite publiquement les fonctionnaires de "lâches, de pleutres et de sans envergure". Contournant les difficultés, il réussit à tourner avec un budget modeste un aggiornamento La Nouvelle Héloïse sur les hauts de Montreux.
 Film testamentaire
C’est du côté de Ramuz encore qu’il trouve le titre de son dernier film, La Séparation des traces (2018). Dans cet essai autobiographique à la fois ludique et crépusculaire, le cinéaste revisite sa vie et son œuvre dans le cadre d’un dialogue avec son fils, Jean Reusser. Il râlait un peu quand on parlait de "film testamentaire". Lui qui n’avait pas son pareil pour capter les transparences du Haut-Lac avait d’ailleurs commencé à travailler sur La Passion Hodler.
[...] 
Dans la scène d’ouverture de La Séparation des traces, le cinéaste, après avoir mangé sur la terrasse de l’hôtel Bellevue, à Heiligenschwendi (BE), un "paniert schnitzel frites" et une meringue glacée plantée d’un petit drapeau suisse, contemple le panorama. Réconcilié, il monologue: "Ça m’irait bien que ça se termine là. Il y a de la sérénité, du paysage, de l’odeur, de la politesse, du respect…". Francis s’est éteint, à l’âge de 78 ans. Puisse-t-il avoir trouvé cette sérénité qui lui a longtemps fait défaut."