lundi 3 octobre 2016

Colloque à Tours sur Pierre et Ilse GARNIER (6-7 octobre 2016)

Les Amis de Ramuz pensent que rien de ce qui est poétique ne leur est étranger...
Voici donc un beau programme de colloque, proposé par Christine Dupouy :











Pierre et Ilse Garnier, deux poètes face au monde

            Pierre Garnier vient de nous quitter, et il nous manque déjà beaucoup. C’était un grand poète, trop méconnu – voir ses problèmes avec l’édition – et peut-être un peu trop rapidement réduit à son expérience spatialiste, qu’il aura d’ailleurs poursuivie jusqu’au bout, ce qui montre bien que les deux aspects de son œuvre, expérimentale et plus traditionnelle, sont indissociables. Il ne faudrait pas oublier non plus les racines de l’Ecole de Rochefort dans les années cinquante, auxquelles le poète reviendra bien plus tard, avec Loire vivant poème, chronique élaborée au cours d’une « résidence » au printemps 1998 ; selon la préface :

"Il s’agit d’une chronique de circonstances comme on dit poésie de circonstances, je veux dire que ce livre a été écrit dans une province, l’Anjou, pour une région et un bourg où est née une « école » poétique qui a rallié des poètes de France, l’école de Rochefort-sur-Loire […]"

            Il est à noter toutefois que Pierre Garnier avait pris une certaine distance avec sa première manière : c’est ainsi que, dans le premier volume des Œuvres poétiques 1950-1968 paru aux éditions des Vanneaux en 2008, il l’a d’abord réduite à une anthologie d’une trentaine de pages, puis il est revenu à la fin du livre sur les poèmes qu’il avait initialement censurés. La partie centrale du volume, « de 1962 à 1968, regroupe l’intégralité des recueils de poésie, la plupart spatialistes, les plus chers à l’auteur », selon les mots de l’éditeur. Dès cette époque la parole est inséparable des pages plus graphiques que Pierre Garnier commente, par exemple page 185 : « Les lettres, les voici galaxies. Apparition de courants, de tourbillons, de souffles ». On n’est pas loin du haut poète Mallarmé.
            Pierre Garnier a cette particularité d’être à la fois révolutionnaire, auteur de « Manifestes » « pour une poésie nouvelle, visuelle et phonique », « pour une poésie supranationale », ce qui explique son rayonnement mondial (du Japon, d’Allemagne, d’Italie, nous viennent des participants) et en même temps un poète d’une simplicité enfantine, émerveillé comme Saint-François devant le soleil ou un oiseau. Pierre Garnier était un fervent défenseur de la nature et des vieilles traditions qui disparaissent – A vécu la mort des bouvreuils, titrait-il. Cela, il peut le dire avec des mots, comme dans Une mort toujours enceinte, ou avec un dessin minimaliste assorti d’une légende, par exemple un cercle précisé par un commentaire « Le dernier pont », dans Le Livre de Peggie, sa chienne. Certains recueils sont exclusivement graphiques, même à une date tardive – ainsi Vues de Marseille, qui date de 1993, qualifiées de « poèmes spatialistes » - ou associant poèmes et images comme Picardie, une chronique. Pierre Garnier précise d’ailleurs que les « poésies spatiales » de Vues de Marseille ont été composées « simultanément aux poèmes de ‘MARSEILLE, UN REPORTAGE’ ». Enfin il convient de noter, comme dernière caractéristique de l’œuvre de Pierre Garnier, le dialogue avec les langues, l’allemand bien sûr, Pierre se faisant publier souvent dans des éditions bilingues franco-allemandes et allant même jusqu‘à écrire directement en allemand, ainsi dans Der Puppenspieler, mais aussi le picard, avec en particulier El Tére a bètes. Chacune de ces langues était incarnée par une personne : l’allemand, c’est Ilse, la compagne de toujours, elle-même poète spatialiste et travaillant en symbiose avec son mari, et le picard, c’est l’écrivain Ivar Ch’Vavar, qui a aidé Pierre Garnier à mettre en forme une langue dont il avait presque tout oublié.
            Lors de ce grand colloque international qui aura lieu à l’université François-Rabelais à Tours en octobre 2016, nous aimerions faire dialoguer tous ces différents aspects de l’œuvre , en faisant intervenir, certes, des spécialistes de référence comme Jean-Yves Debreuille, mais aussi de nouvelles générations de chercheurs moins connus, dont on peut espérer qu’ils apporteront des éclairages encore inédits sur Pierre et Ilse Garnier.


Christine Dupouy 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire